Critique du manuel appliqué de la morale catholique du XXIe siècle

Dimanche 8 février 2015 — Dernier ajout lundi 9 février 2015

Dans le cadre de la prochaine mise en place d’un enseignement moral et laïque, l’enseignement catholique a publié le 3 février 2015, un texte d’orientation « École catholique et formation morale [1] », transformant cet enseignement en nouvelle catéchèse du XXIe siècle.

Au premier abord, on peut constater que l’intitulé a été modifié. En effet, la laïcité, un des principes fondateurs de la République française, a disparu. Après les événements graves que la France a vécus ces dernières semaines, la réaffirmation de la laïcité semble être au cœur des préoccupations du ministère de l’Éducation nationale. Toutefois, ce texte d’orientation semble faire fi de ce principe alors que des millions de Français‑es ont revendiqué haut et fort leur attachement à la laïcité.

Ce texte donne une définition totalement orientée de la morale. En effet, d’après l’enseignement catholique, « la morale exige de sortir des considérations abusivement simplistes sur la vie affective et sexuelle à laquelle elle est parfois réduite », alors que dans une république laïque, la morale a un autre sens. Ainsi le rapport de la mission de réflexion sur l’enseignement de la morale laïque [2] précise que « la morale enseignée à l’École ne peut être qu’une morale laïque en ce qu’elle est non confessionnelle et une morale civique en ce qu’elle est en lien étroit avec les principes et les valeurs de la citoyenneté républicaine et démocratique ».

Ce texte d’orientation dit aussi que l’enseignement moral ne doit pas se limiter à « la réflexion rationnelle » mais qu’il doit amener à « une prise de position sur le sens de l’existence ». Est-ce à un enseignement de transmettre des savoirs qui s’écarteraient du rationnel même s’il s’exerce dans un établissement privé et confessionnel ? Doit-on mettre sur le même plan des enseignements reposant, l’un sur la raison et l’autre sur le sentiment, qu’ils soient religieux ou autre ? Quel‑le enseignant‑e choisir pour dispenser cela ? Du point de vue du SUNDEP, cet enseignement se transformera en catéchèse dispensée sur la dotation horaire prévue à cet effet et prise en charge sur les deniers de l’État. D’après l’article L312-15 du code de l’Éducation, l’enseignement civique « comporte, à tous les stades de la scolarité, une formation aux valeurs de la République, à la connaissance et au respect des droits de l’enfant consacrés par la loi ou par un engagement international et à la compréhension des situations concrètes qui y portent atteinte ». Il n’est aucunement fait référence à « une prise de position sur le sens de l’existence ». Ces interrogations doivent rester dans le domaine privé au même titre que la notion de « mal » abordé dans le texte.

Même si cette notion est présente dans toutes les sociétés, elle n’existe que dans sa relation avec le bien. Ces valeurs sont définies à travers des critères correspondant à une société, à une époque, une culture, une religion… Ces notions touchent à l’absolu et à l’universel et sont ancrées dans toutes les sociétés humaines comme par exemple la notion de l’interdit du meurtre. Toutefois, elles évoluent dans le temps selon l’endroit où l’on se trouve. Dans certains pays, la charia condamne toujours à mort les homosexuel‑le‑s alors que dans d’autres, ils et elles sont plus ou moins intégrées et obtiennent les mêmes droits que les hétérosexuel‑le‑s. Aujourd’hui encore, l’Église reste divisée sur la question de l’homosexualité, qu’elle condamne toujours, même si le dernier synode appelle à quelques modérations concernant cette communauté.

D’ailleurs, dans les établissements catholiques des appels à manifestations contre le mariage pour tou‑te‑s ont été affichées, en salle des professeur‑e‑s, appels accompagnés de pétitions. De plus, s’agissant des lois sur l’IVG ou encore du débat sur la fin de vie, l’Église s’est systématiquement opposée aux lois de la République. Comment imaginer alors que sa lecture des programmes de l’enseignement moral et laïque puisse y être conforme puisqu’au travers des exemples cités nous remarquons que la notion du mal reste toute relative. Il est primordial de souligner ici que, jusqu’à preuve du contraire, dans la République française, c’est seulement la loi qui définit ce qui est mal ; nulle autre institution ne peut s’y substituer.

Comment y lire de la part de l’enseignement catholique un attachement à la liberté de conscience des professeur‑e‑s pour y enseigner la morale républicaine alors même que ce texte d’orientation donne une définition plus que partiale de la conscience, « centre le plus secret de l’homme, le sanctuaire où il est seul avec Dieu et où sa voix se fait entendre [3] » ?

Le SUNDEP Solidaires dénonce le fait qu’à travers ce nouvel enseignement, l’Église catholique en profite pour vouloir (re)christianiser la société française et tente d’y reprendre une position centrale. Aujourd’hui, une infime partie des familles confient leurs enfants à l’enseignement privé sous contrat pour des motifs religieux. L’État doit garder la main mise sur les programmes et doit garantir leur mise en application scrupuleuse. Le SUNDEP Solidaires rappelle que les enseignant‑e‑s sont des agents recrutés et payés par l’État et qu’ils et elles sont tenu‑e‑s de faire appliquer la loi de l’État et seulement celle-ci.

Voir en ligne : Source : Sundep Solidaires

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