Fin de l’Éducation nationale ?

Régionalisation des contrats ?
Lundi 4 décembre 2023 — Dernier ajout samedi 20 janvier 2024

Ça s’appelle « choc de décentralisation »… Valérie Pécresse, présidente de la Région Île-de-France et sa majorité LR (Les Républicains), demandent à l’État la territorialisation de l’Éducation dans notre région.

Ça s’appelle « choc de décentralisation »…

Valérie Pécresse, présidente de la Région Île-de-France, et sa majorité LR (Les Républicains) demandent à l’État la territorialisation de l’Éducation dans notre région, avec pas moins de 5 mesures qui ne laisseront pas d’inquiéter :

  • création d’écoles primaires sous contrat totalement autonomes, c’est-à-dire sans obligation de suivi de programme national,
  • mise sous tutelle des lycées professionnels d’IdF,
  • remodelage par la Région des conseils d’administration des lycées (déjà concrets dans les lycées professionnels),
  • recrutement de professeures associées dans les lycées (c’est-à-dire hors concours),
  • mainmise sur l’orientation et la médecine scolaire. [1]

Cela a été rendu possible par la loi dite « 3DS » [2] ( Différenciation, décentralisation, déconcentration et simplification) de février 2022.

Il s’agit donc d’attaquer l’ensemble du système éducatif par ses maillons les plus fragiles : l’école primaire et le lycée professionnel. Ces écoles sous contrat avec la Région sortiraient du modèle actuel (écoles sous contrat avec l’État) et seraient totalement autonomes.

Cela n‘est pas sans rappeler le modèle adopté par le Royaume-Uni et la Suède depuis une trentaine d’années comme l’évoque un article du supplément M Le Mag du Monde du 18 novembre 2023 [3]. Pour simplifier, l’école publique, en Suède, a reculé depuis 30 ans au profit d’un secteur privé qui s’est abondamment développé selon un schéma néolibéral, ici totalement assumé ! À tel point que certains de ces grands établissements sont cotés en Bourse ! Bien que subventionnées par l’État, ces écoles peuvent en effet se présenter sur un marché boursier de l’éducation absolument florissant, du moins dans ses débuts.

L’élève dispose d’un chèque de l’État qui lui permet de s’inscrire (ses parents) dans l’établissement de son choix, quitte à en changer en cours d’année… L’école gère alors cet argent comme elle le souhaite et ne le réinvestit pas forcément dans le secteur de l’enseignement. Ces établissements proposent le plus souvent un encadrement plus contraignant, le vouvoiement contre le tutoiement des enseignantes, les cours en anglais, des classes moins chargées (pourtant avec des ratios aberrants du type « pas plus de 8 m² par élève ») ! La concurrence se fonde, bien sûr, sur les résultats aux examens… et la sélection à l’entrée selon des critères « élitistes ». Il est même conseillé d’inscrire dorénavant les futurs impétrantes dès la naissance ! Les conséquences immédiates sont que l’Enseignement public, pourtant un modèle incontesté des années 1980, perd du terrain puisqu’il recueille tous les enfants ou adolescentes en âge d’étudier et donc aussi et surtout en difficulté.

Les proportions actuelles sont de 16 % pour l’école et le collège privés, contre 30 % pour le lycée. Rappelons qu’en France la répartition est globalement de 20 % pour le privé contre 80 % pour le public (même s’il ne s’agit que d’une moyenne puisque la réalité est très différente selon les régions).

On peut donc se projeter à court terme dans le paysage futur de l’Éducation en France : un grand domaine privé, autonome, subventionné et qui n’aura pourtant plus de compte à rendre au niveau national ou… régional. Des enseignantes sur-précarisées (puisque sans doute recrutées à la mission) et un secteur public paupérisé, réceptacle de tous les problèmes sociaux, comme il l’est déjà dans de nombreux secteurs.

Pourtant le système suédois comme l’anglais, tant vanté en son temps par l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économique), relève maintenant à ses yeux d’un véritable échec, ce qui pousse ce même organisme à œuvrer dorénavant dans l’autre sens, c’est-à-dire pousser à la réintroduction de l’étatisation dans la gestion de l’éducation ! [4]

Voilà donc ce qui risque de nous arriver dans très peu de temps et qu’il faudra corriger dans… 30 ans ! L’hypothèse risque donc de devenir une sèche réalité et il devient évident que les forces syndicales des Enseignements privé et public auront tout intérêt à se rapprocher et à travailler de concert pour combattre ces projets et organiser la défense des personnels !

Documents à télécharger

Dans la même rubrique…

Revenir en haut